En réaction à la proposition du Kenya de mener la force multinationale censée aider Haïti à éradiquer la violence des gangs, lors d’un point de presse à Hamilton, en banlieue de Toronto, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, s’est exprimé avec amertume à propos du gouvernement haïtien et la classe politique haïtienne en générale, pour leur rôle dans la persistance de la crise multidimensionnelle que traverse le pays.
« Ça fait trois décennies qu’on est là en Haïti à différents moments pour aider à contrer la violence, l’instabilité politique, une situation humanitaire épouvantable, et on se retrouve quand même, maintenant, dans une situation qui est parmi les pires qu’on n’ait jamais vues malgré trente ans d’appuis et d’investissements », s’est plaint Trudeau.
Plus loin, il fustige la classe politique haïtienne qui, dit-il, ne fait rien pour assumer les responsabilités qui sont les leurs, affirmant que son gouvernement compte bien leur mettre la pression. « On est là pour mettre de la pression sur la classe politique en Haïti, qui n’est pas en train de prendre au sérieux la responsabilité qu’ils ont de faire des compromis et rétablir la sécurité », a lancé le premier ministre canadien, qui promet que son pays continuera « de faire partie de la solution à côté des Haïtiens qui doivent être au cœur de toute solution qu’on met de l’avant.
» Cette intervention du chef de gouvernement du Canada arrive au moment où le Kenya s’est porté volontaire pour diriger la force multinationale sollicitée par le gouvernement haïtien auprès des Nations Unies, en attendant le vote du Conseil de sécurité de l’ONU sur la résolution approuvant le déploiement de cette force.
Le Canada, longtemps pressenti pour diriger cette force multinationale sous insistance des Etats-Unis, s’est rétractée, disant que les forces armées canadiennes sont en reconstruction dans un contexte de mission de soutien à l’Ukraine et l’Otan, avec des milliers de soldats envoyés en Lettonie pour contrecarrer la Russie et la Biélorussie, pour près d’un milliard de dollars canadiens d’assistance militaire. Rappelons qu’au premier trimestre 2023, le Canada a effectué deux missions de renseignement, de surveillance et de reconnaissance « pour soutenir les efforts de la police nationale pour rétablir la sécurité dans le pays ».
À la suite de ces missions, l’état-major canadien a réitéré la position du gouvernement dirigé par Trudeau selon laquelle la solution à la crise doit venir d’Haïti. « Le Canada est très ouvert à jouer un rôle important, mais nous devons avoir un consensus haïtien », avait annoncé fin 2022 le premier ministre canadien avant d’ajouter que « si nous voulons résoudre ces problèmes, et le grand défi auquel est confronté le peuple haïtien, nous doivent avoir un accord, une harmonie politique très claire sur la voie à suivre. »